Discussion avec "Stéphanie"

Pour essayer de vous expliquer un peu comment je me sens, voici une conversation que j'ai eu avec "Stéphanie". Je ne connais pas Stéphanie. Cette fille est venue me parler comme ça sur un forum de discussion sur la santé mentale. Je ne le connais pas, mais j'ai tellement l'impression qu'elle me connaît. C'est surprenant comment elle peut mettre des mots sur exactement comment je me sens. De mon côté, j'ai beaucoup de difficulté à mettre des mots sur ma douleur, sur ce mal de vivre.

03/01/2009, 14h40
Re : Bonjour Niny...
Une de mes amies a écrit une pièce de théatre sur le trouble Borderline... Il y a une phrase (ça se peut que j'écorche la citation, mais bon... la finale est intacte...)
"Le trouble de personnalité limite...
à la limite de quoi?
à la limite de ce que crois être
à la limite de ce que je suis
à la limite de ce que je peux endurer
mais surtout...
à la limite de te sacrer un coup de pelle dans la face chaque fois que tu me dis qu'il y a rien là..."

Ton amie ne sais pas ce que tu vis... et même si tu partais, ça demeurerais abstrait pour elle. Parce qu'elle ne ressent pas les choses aussi intensément que toi.

Ce que tu vis est très intense...
Ce n'est pas des menaces que tu fais... tu exprimes comme tu peux que tu as mal.
Lorsque je ne réussis pas à exprimer ce que je ressens... je le démontre comme je peux.

Mais parfois on se bute au mur d'incompréhension. Comme s'il fallait expliquer à quelqu'un qui n'a jamais gouté un aliment ce que ça goute... expliquer à un aveugle qui n'a jamais vu, ce qu'est le rouge.... Pas facile.

Pour ma part, j'en ai parlé à mon entourage. Mais j'ai cessé de vouloir tout expliquer. Bien sûr on me posais des question. Mais si je n'en avais pas la réponse, je le disais. En ramenant l'exemple de l'aveugle.

Ce n'est pas parce qu'un aveugle n'arrive pas à se représenté le rouge, ni parce que pour lui c'est une notion abstraite... que le rouge n'existe pas.

Mais c'est frustrant d'entendre d'autre nier ce qu'on ressent. Juste parce qu'il n'arrive pas à se le représenter.

Mais maintenant, mon entourage a compris qu'il ne pouvait pas tout comprendre, mais que moi je ressens les choses différemment.

C'est un soulagement que je te souhaite pour l'année 2009.
Tu traverses l'étape la plus dure... Y a rien que je puisse dire pour enlever ce poid. Mais je suis avec toi, et je n'ai pas oublié ce que c'est...

Stéphanie

_____________________________
***** Les parties en gras sont écrites par moi, et italique par Stéphanie****

03/01/2009, 16h50
Re : Bonjour Niny...
Bonjour Niny,

Citation:
Posté par Niny1
J'adore la phrase dans la pièce de ton amie, tellement bien dit.

Je compte, lui demandé le DVD de sa pièce pour la faire voir à une amie. Si tu veux je peux lui demander si je peux t'en envoyer une copie.

J'ai beaucoup de peine face à mon amie parce qu'elle est travailleuse sociale,

Travailleuse sociale... donc pas spécialiste du trouble Borderline.

c'est elle qui m'a expliqué c'était quoi vraiment le trouble borderline. Elle m'a suggèré plein de lecture. Sauf que maintenant, elle se fâche après moi parce que je ne vais pas mieux même si je sais qu'est-ce que j'ai.

On arrête pas d'avoir le nez bouché parce qu'on a la grippe.
Je pense que ce n'est pas toi qui la fâche. Mais vu que c'est ton amie, elle tien à toi. Donc du coup, elle voudrait pouvoir soulager ton mal. Mais elle est confronté au fait qu'elle n'y peut rien. Ce qui est frustrant.
Mais ça... elle n'en est probablement pas consciente.
Mais il y a une grande marge entre savoir et ressentir les choses.

Tu as touché exactement mon problème, je veux tout expliquer à tout le monde. Je voudrais tellement que les gens comprennent ma douleur, comment je me sens.

Les gens peuvent comprendre que tu as mal, mais ne peuvent la ressentir.
Si tu réussissais à lâcher prise un peu sur ce point, tu en serais soulagée.

À ce moment là, tes amis pourraient te soutenir davantage. Parce qu'autant qu'il ne peuvent te faire ressentir d'autres perceptions que ce que tu as, autant tu ne peux leur faire ressentir ce que toi tu vis. Ça créé un mur entre deux incompréhension...

Mon mari et ma mère ont vu la pièce de mon amie. Ils ont compris beaucoup de choses, dont celle... de ne pas pouvoir voir les choses au travers mes lunettes... mais sans nier ma vision des choses.

Juste un exemple, je devais adopter un enfant en Ukraine et ça n'a pas fonctionné. J'ai été très affecté par tout ça, énormément de peine. J'ai raconté mon histoire au complet sur un blog, juste pour que les autres comprennent ma peine... ok, ça n'a pas vraiment fonctionné parce que mon entourage proche n'a même pas lu le blog (www.angedukraine.blogspot).

Si mon amie me permet de t'envoyer une copie, peut-être que tu pourrais la montrer à ceux qui essaie de te comprendre... sans y parvenir.

Parfois, les explications extérieures sont mieux reçues. Pas parce que tu n'est pas capable, mais parce que c'est difficile d'entendre de la bouche de quelqu'un qu'on aime qu'elle a mal.J'ai essayé de voir le blog, mais le lien m'indique que la page est introuvable...

Je ne sais pas qu'est-ce que ça me donnerait de plus que les gens comprennent ma souffrance...

Déjà s'ils comprenaient qu'ils ne peuvent pas tout comprendre... en comprenant que toi, tu vis ces choses... Ce serait déjà bien.

Mais d'avoir l'impression que les autres nie ce qu'on vit est très dur. Mais au fond... ils sont surtout confronté à leur impuissance.

J'ai peur de parlé souvent parce qu'une fois que mes amis connaissent vraiment mon histoire, ils me fuient... ils disent qu'ils vont rester pareil mais c'est pas vrai... sauf pour une amie, ça fait 5 ans qu'elle est toujours à mes côtés et on ne se chicane jamais.

Elle est capable de recevoir ce que tu lui dit... sans nier ce qu'elle ne comprend pas.
J'ai perdu aussi beaucoup d'amis... Mais celle qui me reste... c'est la plus précieuse.

J'ai l'impression que tu comprends tellement tout... ça fait du bien pour une fois.

T'es pas folle... tu es hypersensible. Lorsque tu es heureuse... tu es hyper heureuse...
Mais quand tu as mal, tu as hyper mal.
Y'a pas de demi-mesure... et pour le moment tu ne réussis pas à nuancer tes émotions. Mais ça s'apprends... avec le soulagement qui vient avec.
Je ne parle jamais de guérison... mais plutôt de rééducation.

Stéphanie